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Je suis une muse délirante et "délireuse", passionnée d'écritures et de lectures. J'aime la vie, la lumière et le bonheur !

17 avril 2011

Le 15 Avril, Célébrons la Terre féconde...



.... Lorsque se sera levé le troisième jour après les Ides de Vénus,
Pontifes, offrez en sacrifice agréable une vache pleine.
Une vache qui porte est dite Forda et sa portée désigne qu'elle est féconde.
On pense que les foetus aussi tirent de là leur nom.
À ce moment, le bétail est gravide ; gravide aussi la terre ensemencée.
À la Terre pleine est offerte une victime pleine.
Une partie des victimes est immolée sur la citadelle de Jupiter ;
à chacune des trente curies échoit une vache, et le sang répandu dégouline.
Mais, dès que les préposés ont arraché les veaux aux entrailles de leur mère
et offert les morceaux de fressure sur les foyers fumants,
la Vestale la plus âgée brûle les veaux dans le feu : et cette cendre servira à purifier le peuple au jour de Palès.
Ovide, Fastes IV, 629-641

Nous vous invitons à célébrer la fête la plus impressionnante peut être de l'année romaine.
Elle avait lieu dans le cadre de la Curie, plus vieille division du peuple. A Rome il en existait trente. C’est une fête plébéienne. Par opposition aux fêtes de la Grande Déesse réservées aux patriciens et dont nous avons parlé.
Le 15 Avril les pontifes égorgent deux vaches pleines pour chacune d’entre elles, une au Capitole et une dans chaque Curie.
Ensuite, on arrache des entrailles des vaches égorgées, les embryons des veaux que l'on fait griller.
On en confie ensuite les cendres à la grande Vestale qui les conserve avec des tiges de fèves creuses et le sang qui a coulé de la queue du cheval d'Octobre dont nous reparlerons, en Octobre...
Ces trois restes sacrificiels seront distribués au peuple le 21 Avril lors des Parilia
On offre en sacrifice une vache pleine parce que comme le rappelle Ovide : « A la Terre pleine, on offre une victime pleine. »
Le vieux roi Numa offrit le premier ce sacrifice pour faire cesser une épidémie, sur l'ordre du dieu Faunus.
On peut assimiler ce Faunus à Pan, divinité d’Arcadie, où s’élevait le mont Ménale.
Les Romains célébraient Faunus à plusieurs reprises dans l’année notamment lors des Lupercales ou pour conjurer la foudre.
Sa maîtresse, la nymphe Egérie l'aida en lui révélant la signification de l'oracle de Faunus : « Il faut sacrifier, roi, deux vies en une »
Etrange oracle on l'avouera. Mais Egérie en comprend la signification : il s'agit d'une vache qui porte un veau et qu'on appelle « forda » (du verbe « ferre » - porter)
C’est pourquoi le sacrifice s'appelle « le meurtre des vaches pleines » : Fordi – cidia (du verbe caeso qui signifie aussi tuer)
Égérie est déjà intervenue pour aider Numa à conjurer la foudre. Ovide nous précise qu'elle vivait dans le bois sacré de la Diane d'Aricie.
Le sacrifice était donc offert, toujours d'après Ovide à Tellus, la terre pleine, pleine de semence dont il faut aider la délivrance le jour venue. Le produit de la terre lui aussi sera arraché à ses entrailles, puis transformé en grain et farine, et servira, une fois « brûlé » (cuit au four) à nourrir les hommes
Le sort que subit l'embryon de veau préfigure et garantit celui que subira le grain qui après passage lui aussi par le feu deviendra le pain…
Le pain sert à nourrir les hommes la boucle est bouclée.
Relisons le poète :
« Au temps du roi Numa, la récolte ne répondant pas aux efforts fournis,
les voeux des cultivateurs déçus demeuraient sans effets.
L'année souffrait de sécheresse, sous l'Aquilon glacial ;
ou les champs étaient gorgés d'eau, à cause de pluies incessantes.
Souvent Cérès, dès l'apparition des premières pousses,
décevait le maître, et la folle avoine envahissante occupait le sol ;
les troupeaux mettaient bas des prématurés avant leur terme
et l'agneau naissant causait souvent la mort de la brebis.
Une antique forêt, longtemps restée à l'abri des coups de hache,
abritait un lieu sacré, réservé au dieu du Ménale.
Ce dieu fournissait des réponses aux esprits au repos, dans la nuit silencieuse.
En ce lieu, Numa immole deux brebis.
Il offre la première à Faunus, la seconde au doux Sommeil ;
Il étend les deux toisons sur le sol dur.
Deux fois il inonde d'eau de source sa tête chevelue,
deux fois, il se couvre les tempes de feuilles de hêtre.
Il s'abstient des plaisirs de Vénus ; à table, la viande est interdite
et ses doigts ne portent aucun anneau.
Vêtu d'un habit grossier, il s'étend sur les toisons nouvelles après avoir invoqué le dieu dans les termes adéquats.
Pendant ce temps, vient la Nuit, le front serein orné de pavot,
entraînant avec elle les songes noirs.
Faunus se présente et, piétinant lourdement les peaux de mouton,
énonce les mots suivants, depuis le côté droit de la couche :
et dit : "On te réclame la fressure d'une vache pleine."
On offre la fressure d'une vache pleine ; l'année s'avère féconde,
et la terre autant que le bétail portent des fruits.
Ovide, Fastes IV, 629-641

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