La suite du rififi dans le garum : les tristes pensées de la douce Octavie femme de Néron
L’Empereur n’avait pas hésité à tuer sa mère, poussé il est vrai par ses perfides conseillers : sa maîtresse Poppée et son vieux précepteur Sénèque. Tous les trois avaient imaginé leur plan lors d’un spectacle à Naples. On représentait une bataille navale et le navire construit tout exprès pour l’occasion se disloquait et tous les combattants tombaient à l’eau dans un grand fracas de naufrage.
Octavie assistait au spectacle et à ce moment, elle avait remarqué une lueur de connivence dans leurs regards c’était comme si reliés par des fils invisibles, l’idée prenait forme dans leurs monstrueux cerveaux, ils avaient, au même instant trouvé la solution à leurs envies : éliminer Agrippine. Chacun avait ses raisons.
Poppée et Agrippine se détestaient depuis presque toujours, Sénèque ne supportait plus l’arrogance de son ex-maîtresse qui s’ingéniait à dresser des obstacles entre lui et son ancien élève. Sénèque avait compris que tant qu’Agrippine serait là, il ne pourrait pas espérer avoir une quelconque part à la direction des affaires.
Et Néron, Néron, ce bon petit garçon. Il s’était mis à haïr sa mère, sa façon de lui parler comme à un enfant, les regards courroucés ou au contraire trop admiratifs qu‘elle lui jetait lorsqu‘elle siégeait à ses côtés, ses continuelles allusions à Germanicus et ses glorieux ancêtres les Jules, jusqu’à sa façon de s’habiller, en austère matrone respectable comme pour mieux faire sentir la vulgarité des manières provocantes de Poppée et sa clique. Des trois, c’était sûrement celui qui la détestait le plus car c’était celui qui l’avait le plus aimée.
Un bateau avait été construit en secret sur le même modèle, il devait s‘ouvrir en deux au milieu du golfe et le plafond de la chambre de parade destinée à l‘impératrice s‘écrouler sur le lit, écrasant la dormeuse.
Un bateau avait été construit en secret sur le même modèle, il devait s‘ouvrir en deux au milieu du golfe et le plafond de la chambre de parade destinée à l‘impératrice s‘écrouler sur le lit, écrasant la dormeuse.
Néron avait joué les fils attentionnés et convié sa mère à un somptueux diner de réconciliation. Poppée avait été priée de rester chez elle et Agrippine avait été la reine de la fête. Son fils à ses pieds, admiratif et ne trouvant pas de mots assez affectueux pour lui parler, la cajoler, l‘embrasser.
Toute la compagnie s’était séparée de fort bonne humeur et comme il était fort tard Néron avait alors proposé à sa mère de lui prêter ce bateau tout nouveau pour la reconduire jusqu’à sa villa de l’autre côté de la baie. Elle avait accepté car l’attitude Néron pendant tout le repas avait désarmé ses craintes.
A peine arrivé au milieu de la baie devant les yeux des derniers convives qui entourait l’Empereur. Le navire, comme sous l’effet d’une violente tempête, s’était disloqué. On entendait les cris depuis le rivage, il y avait grand fracas et grande rumeur. Les spectateurs étaient pétrifiées et Néron cloué sur place de stupeur.
Mais l’impératrice était une bonne nageuse, elle avait réussi à s’échapper, la charpente du plafond de la chambre qui s’était effondré sur elle ne l’avait que blessée. La nuit et la panique avait été ses plus sûrs alliés. Elle se réfugia chez un pêcheur avant de rentrer chez elle et d’envoyer un messager à son fils pour le prévenir qu’elle était sauvée.
Octavie pensait que l’amour maternel lui avait fait là commettre une imprudence fatale. Elle aurait dû regagner Rome et là comme elle savait si bien le faire, émouvoir le Sénat et surtout les cohortes prétoriennes par le récit des horribles manigances de son fils.
Elle aurait dû aller au milieu des troupes leur rappeler qu’elle était la fille de ce Germanicus qu’ils avaient tant aimé et soutenu, la descendante d’Auguste, le fondateur de l’Empire par deux fois, leur seule vrai Impératrice animée de la Virtus, le vrai courage romain.
Elle aurait pu rallier Burrus à sa cause et là accusant à mots couverts son fils de matricide, crime horrible, récupérer le pouvoir.
Oh elle, Octavie lui aurait même prêtée main forte. Elle aurait pu l’accompagner toute droite drapée dans sa dignité d’épouse délaissée. Elle l’aurait aidée car cela lui aurait sauvé la vie à défaut de la changer…
Elle frissonna.. Pour combien de temps encore ?
Combien de temps encore Néron allait-il l’oublier dans cette villa et la laisser vivre ?
Elle devrait fuit, s’exiler, suivre les conseils de son poète. Aller sur les rivages grecs et même au delà chez les Scythes, là où Néron n’est qu’un nom.. Et vivre inconnue.. Mais vivre. Elle n’aurait qu’à couper ses cheveux, avec sa silhouette gracile elle passerait facilement pour un jeune homme, de là un bateau pour la Sicile, une simple barque suffirait et puis un autre….
Il y avait tant d’île et la mer était si grande. Elle pourrait vivre en tissant, en racontant des histoires, sans bruit et sans éclat.
Quel bon tour elle jouerait à Néron et à Poppée….
Cela la fit sourire… mais non !
Une romaine ne fuit pas déguisée comme un voleur. La fuite dans les vers d’un poète est toujours facile, les périls du voyage ne sont que des idées mais, pauvre Octavie qui n’était jamais allée seule jusqu’à l’autre bout du Forum… partir sur la mer.
Elle soupira, elle n’avait pas ce courage, la peur de l’avenir n’était pas suffisante.. .
Au contraire la terreur et l’incertitude sur son sort la paralysait, lui engourdissait le cerveau, il lui semblait qu’elle devenait plus lente encore.
La suite à demain.... l'histoire maintenant que la trame historique est posée peut démarrer